La Rosa Púrpura del Plata


Photo: Martin Babino

 

 

 

Codex Zuola

Musique et poésie au Pérou et au Mexique baroques Codex Zuola (Pérou) Le «Códice Fray Gregorio de Zuola», originaire de Cuzco  (Pérou), fut l’un des premiers documents concernant la musique ancienne  d’Amérique Latine dont les musicologues prirent connaissance. Bien que  « découvert » dans les années 1930, ce manuscrit renferme encore des énigmes  qui découragent beaucoup d’interprètes. Cependant, ces chansons rayonnent de  lumière, non seulement par leur valeur artistique certaine, mais aussi parce  qu’elles nous éclairent sur une pratique musicale pauvre en références.  Le codex Zuola possède en lui-même un grand intérêt car il joue le rôle  d’intermédiaire entre la tradition hispanique des tonos humanos  (essentiellement à transmission écrite) et la musique monodique  traditionnelle du sud des Andes péruviens (à transmission essentiellement  orale). Il contient 18 chansons qui paraissent avoir la même provenance.  Nées de parties vocales de chansons polyphoniques espagnoles, elles circulèrent  à travers la péninsule ibérique et les colonies américaines et se transformèrent  au gré des divers groupes sociaux qui les adoptèrent. C’est après cette étape de transmission orale que Zuola les écrivit à nouveau. Le processus de  transformation peut vraisemblablement avoir continué indépendemment du texte  écrit. Cependant, nous pouvons les considérer aujourd’hui comme faisant  partie de la tradition des tonos humanos ou chansons polyphoniques séculaires du baroque qui se répandit à travers tout l’empire espagnol (Dime Pedro).  Parmi les 16 chansons séculaires du manuscrit, l’une d’elles est présentée en deux versions dont le texte et la musique concordent. Neuf autres chansons  présentent des concordances en dehors du manuscrit quatre pour le texte et  cinq pour le texte et la musique. Ces concordances témoignent clairement de  la dynamique particulière des tonos humanos qui circulaient en formes variées et dans divers milieux musicaux : chansons séculaires, musique de scène pour comédies et drames, villancicos religieux, danses et diferencias (variations) pour harpe ou pour guitare. Les tonos étaient généralement écrits comme des  chansons chorales à trois ou quatre voix, et plus tard dans l’histoire, comme des solos ou des duos avec basse continue. Contrairement à cet usage, la  plupart des mélodies du codex Zuola sont notées comme des monodies sans basse , à la manière d’une chanson populaire. Nous avons cherché à reconstruire les pièces présentées ici, telles qu’elles auraient pu être entendues et interprétées  à leur époque. Mis en musique de façon subtile, simple et ravissante, et en  dépit des mystères que notre conception actuelle puisse leur trouver, les  textes de Lope de Vega, Calderón de la Barca et leurs contemporains, emplis  de beauté et de délicatesse, resplendissent et prennent vie à travers un  regard qui tente d’intégrer la musique ancienne « savante » et la musique de  tradition orale comme le folklore.  La musique pour guitare en Amérique baroque Aux pièces du codex Zuola nous avons ajouté quelques oeuvres pour guitare  baroque appartenant à divers manuscrits découverts au Mexique, et qui  témoignent d’un développement musical et instrumental très fertile et vivant, tout à fait différent des grandes oeuvres de musique religieuse du passé  colonial. Parmi les chroniques de la vie séculaire en Amérique Latine avant  le début du XIXème siècle, de nombreux documents font allusion à la présence  de guitares, de petites guitares et de vihuelas, instruments liés directement à la danse, la poésie et la chanson, à l’activité nocturne des créoles, des  métis et des noirs, et occasionnellement, aux représentations d’opéra. Au fil des années, les diverses formes d’instruments à cordes pincées «importés» par les conquistadors, développent de nouvelles caractéristiques dérivées de leur application à la musique folklorique, dans laquelle la riche tradition de la musique espagnole du XVIIIème siècle s’amalgame aux apports des natifs et  des noirs. De cette fusion naissent des instruments comme le charango, le cuatro, la bandola llanera du Venezuela, et les jaranas mexicaines, entre autres.  Códice Saldívar 4 Il a été trouvé chez un antiquaire par le musicologue  Gabriel Saldívar au début des années 1940. Il s’agit d’un manuscrit très soigné, attribué au guitariste espagnol Santiago de Murcia (1685 - 1732) qui  vécut ses dernières années au Mexique. C’est un riche portrait des pièces caractéristiques de guitare du contexte espagnol (Marizápalos, Jácaras, Canarios, Marionas, Minuetes, entre autres) écrit avec une grande finesse et une évidente connaissance de l’instrument. Il combine le style « rasgueado »(1) propre à la guitare à 5 choeurs, avec le style pincé. Nous avons extrait de ce manuscrit : Las penas, pièce très lyrique et nostalgique ; Canarios, danse très joyeuse et très populaire ; Las sombras, que nous avons choisi surtout à cause de sa concordance avec une pièce du codex Zuola (No sé a qué sombras funestas) et avec un air de l’opéra La púrpura de la rosa de Tomás de Torrejón y Velazco, créé à Lima (Pérou) en 1701. Deux autres pièces de ce manuscrit sont présentes ici : El amor, oeuvre qui rappelle l’air de l’Amour de l’opéra La púrpura de la rosa, et Marionas, danse très populaire et similaire à la chaconne italienne. El amor est précédé d’un court prélude du même auteur très répandu au Mexique (Resumen de acompañar la parte con la guitarra, Madrid 1714), et dans Marionas, au texte  original que joue la guitare grave, nous avons ajouté une deuxième partie  écrite pour une guitare accordée en la (Canarios).  «Manuscrito 1560» (Biblioteca Nacional de México) Il a été écrit par un élève de Murcia ou par un guitariste mexicain inconnu. Il contient un grand nombre de pièces d’un genre léger ou de danse, des menuets, et quelques transcriptions des sonates pour violon de Corelli. D’une qualité musicale plutôt irrégulière , il ne supporte pas la comparaison avec le codex Saldívar et le Resumen de  acompañar la parte, à l’exception de quelques pièces qui concordent avec  celles de ces manuscrits, et quelques autres pièces sélectionnées pour cet  enre-gistrement : Minuetes, deux menuets joués l’un à la suite de l’autre,  suivis d’un troisième menuet appartenant au Resumen de acompañar la parte  presque identique à un menuet du Ms 1560 ; la délicieuse Guastala ; et enfin  une pièce sans titre que nous avons provisoirement nommé Rondó. Ces deux  dernières oeuvres sont présentées une première fois dans leur version originale  pour guitare seule, suivie d’une version à deux guitares égales (guitares à 5 choeurs en mi) ; la partie de la deuxième guitare a été spécialement écrite  pour cette occasion.  Notes sur la reconstruction Les oeuvres du codex Zuola, à l’exception de "Dime Pedro" et "Porqu’tan firme  os adoro" ont fait l’objet d’une reconstruction qui a revêtu plusieurs aspects : d’une part, l’ajustement des valeurs rythmiques qui ne correspondaient pas  à l’accentuation du texte, où Que importa que yo lo calle fut le cas le plus  complexe ; d’autre part la mise en place de structures métriques régulières,  obscurcies dans l’original par la notation ; et enfin, l’élaboration d’un  accompagnement instrumental approprié au caractère de chaque pièce puisque,  à l’exception des pièces polyphoniques, les mélodies ne possèdent ni basse ni indications pour leur accompagnement. Pour créer ces accompagnements, nous  avons pris comme point de départ le style qui dominait la scène hispano-créole des grandes villes américaines du XVIIème siècle, exprimé dans les tonos  humanos et tonadas des opéras espagnols de cette époque (2), et celui des  romances des vihuelistes espagnols du XVIème siècle (surtout Alonso Mudarra  et Luys Milán). C’est sur ces bases que nous avons réussi à élaborer des  accompagnements pour guitare à 5 choeurs (3) et vihuela, qui dans certains  cas prennent la forme d’une «basse continue», dans d’autres celle d’un  «alphabet pour guitare» (un système du XVIIème siècle comparable à  l’accompagnement par accords ou par chiffrage américain de la musique  populaire et folklorique d’Amérique Latine) et en tablature pour vihuela,  dans un style bien plus lié à la tradition de la Renaissance espagnole.  

                                                                                            Gabriel Schebor 

(1)Rasgueado est une forme de jeu qui consiste à frotter rythmiquement les  cordes avec les ongles de la main droite, pendant que la main gauche plaque  des accords sur le diapason de la guitare.  

(2) Par exemple La púrpura de la rosa, de Torrejón y Velazco, sur un livret  de Calderón de la Barca, créé à Lima (Pérou) en 1701; et El robo de Proserpina y la sentencia de Júpiter, de Filippo Coppola, sur un livret de Manuel García Bustamante, créé à Naples en 1678. Dans les deux cas nous remarquons l’abondance d’airs narratifs basés sur la répétition d’un même schéma musical sur lequel les textes changent comme dans un récit. Dans le Robo de Proserpina, en fait , quelques uns de ces airs possèdent jusqu’à neuf couplets. L’effet hypnotique que produit la répétition constante du schéma musical permet à l’auditeur de se concentrer sur la signification du texte. Toutes les pièces vocales du  codex Zuola empruntent cette forme, permettant ainsi d’apprécier la richesse poétique des textes.  

(3) Instrument d’accompagnement par excellence au XVIIème siècle espagnol et  dans le contexte séculaire de la période coloniale. Par ailleurs, on trouve  dans le codex Zuola une page représentant une gravure de cet « alphabet pour  guitare », ce qui nous laisse penser que l’utilisation de cet « alphabet »  pour la reconstruction de ces pièces est pleinement justifié. 

Bárbara Kusa

Bárbara Kusa est née à San Luis (Argentine). Elle commence ses études musicales dans sa ville natale, puis s’installe à Buenos Aires pour poursuivre ses études à la Facultad de Artes y Ciencias Musicales de l’Université Catholique Argentine, où elle obtient son diplôme de Licenciée en Direction Chorale. Elle poursuit des études de chant avec le professeur Mónica Capra. Néstor Andrenacci, Josep Prats, Werner Pfaff, Monique Zanetti et Renata Parroussel ont été, entre autres, ses professeurs.

Elle fait plusieurs tournées en Argentine, au Brésil, en Bolivie, en Espagne, au Canada, en Belgique, en Allemagne, en France, en Italie et en Suisse avec plusieurs ensembles, dont le Coro Polifónico de San Luis, l’ensemble Pigmalión, la Compañía Los Festinantes, le groupe Cantica Nova, le groupe Proyecto Croma, Grupo de Canto Coral, Ensamble Elyma, l’Ensemble Louis Berger et La rosa púrpura del Plata. En tant que soliste, elle se produit avec des oeuvres de Schubert, Brahms, Mozart, Vivaldi, Monteverdi, Rameau, Lully et des oeuvres des missions jésuites de Chiquitos (Bolivie, XVIIIème siècle). Elle a souvent chanté sous la direction de Néstor Andrenacci, Javier Zentner, Claudio Morla, Ricardo Massun et Gabriel Garrido.

Elle a réalisé plusieurs enregistrements comme soliste et comme intégrante des divers ensembles auxquels elle appartient pour le compte de labels argentins et français, entre autres: "Música en las Reducciones de Chiquitos", "Convidando está la noche" musique baroque latino-américain (Grupo de Canto Coral, Néstor Andrenacci), "Veneno de los sentidos" et "Cortesanos del Tajo" musique baroque d'Espagne (La compañía del Tempranillo -Miguel de Olaso) ; et pour le label K617-Chemins du baroque:"Vêpres solennelles de Saint Jean Baptiste", et "Missa de Lima - Venid Deidades" musique baroque latino-américain (Ensamble Elyma-Gabriel Garrido; Ensamble Lois Berger-R.Massun).

Avec "La rosa púrpura del Plata", elle a enregistré pur le label français "Voice of Lyrics"   El Amor, las penas y las sombras , qui a obtenu la distinction du "2002 C.A.M.U.- Tribuna de la música argentina" (Conseil International de la musique-Unesco) .

 

Gabriel Schebor

Gabriel Schebor réalise ses études musicales à Buenos Aires (Argentine), sa ville natale, au Conservatoire Provincial de Musique « Juan José Castro », où il obtient le diplôme de Professeur supérieur de guitare. Graciela Pomponio, Dolores Costoyas et Víctor Villadangos furent ses professeurs. Il prit aussi des cours de perfectionnement avec Jorge Martínez Zárate, Eduardo Isaac, Roberto Aussel, Eduardo Egüez, Carlos Ravina, Hopkinson Smith et Gabriel Garrido.

Il se produit lors de nombreux concerts en Argentine, en Uruguay, au Brésil, en Bolivie, en Allemagne, en Suisse en Italie et en France. Il a été aussi l’hôte de plusieurs festivals, notamment le Festival International de Sarrebourg (France), Festival de Chiquitos (Bolivie), Primavera barroca de Rio de Janeiro (Brésil). Il a collaboré à maintes reprises avec l’Ensemble Louis Berger (direction Ricardo Massun) et l’ensemble Elyma (direction Gabriel Garrido) pour la réalisation de la basse continue. En tant que soliste, son répertoire inclut des oeuvres de musique française et italienne du XVIIIème siècle pour luth et théorbe, ainsi que des oeuvres mexicaines et espagnoles de la même période pour guitare baroque.

Il a enregistré pour des labels argentins et français plusieurs CD de musique baroque sur instruments originaux, la plupart d’entre eux sous la direction de Gabriel Garrido et Ricardo Massun : "Musique baroque à la Royale Audience de Charcas"; "San Ignacio, l’opéra perdu des missions jésuites de l’Amazonie"; "Vêpres solennelles de Saint Jean Baptiste";" Misión San Francisco Javier";" Missa de Lima - Venid Deidades" . Tous ces C.D.'s contenant musique du baroque latino-américain, et edités par le label K617, collection "Les chemins du baroque".

Avec "La rosa púrpura del Plata", il a enregistré pur le label français "Voice of Lyrics"   El Amor, las penas y las sombras , qui a obtenu la distinction du "2002 C.A.M.U.- Tribuna de la música argentina" (Conseil International de la musique-Unesco) .

 

 

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